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Transfert du contrat de travail

Transfert conventionnel de contrat : impossible pour le nouvel employeur d’invoquer un refus du salarié pour faire échec au transfert

Le transfert conventionnel du contrat de travail d’un salarié ne peut s’opérer qu’avec l’accord exprès de celui-ci. Cette règle édictée dans l’intérêt du salarié ne saurait être détournée par le nouvel employeur, qui ne peut donc pas se prévaloir de l’absence d’accord du salarié pour faire échec au transfert.

Transfert conventionnel du contrat de travail : l’accord du salarié est exigé

Dans certaines activités de prestation de services (ex. : sécurité, propreté, déchets, restauration des collectivités), des accords professionnels organisent les transferts des contrats des salariés en cas de transfert de marché en deux prestataires.

Ces transferts des contrats de travail, dits « conventionnels », ne suivent pas le régime juridique des transferts de contrats mis en œuvre dans le cadre de l’article L. 1224-1 du code du travail (ex « L. 122-12 »).

La principale différence réside dans le fait, que contrairement au transfert légal, le transfert conventionnel du contrat nécessite de recueillir l’accord exprès du salarié (cass. soc. 3 mars 2010, n° 08-41600, BC V n° 51).

Cette règle a été édictée dans l’intérêt du salarié, de sorte que le nouvel employeur qui reprend le marché ne peut pas invoquer à son avantage l’absence d’accord du salarié à son transfert, pour se décharger du paiement d’indemnités de rupture, comme c’était le cas dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 juin 2019.

Dans cette affaire, un marché d’exploitation de déchets ménagers avait été transféré d’une entreprise A. à une entreprise B. Ce transfert était régi par l’avenant n° 42 à la convention collective nationale des activités de déchet.

Pour la mise en œuvre de ce transfert, l’entreprise B. avait soumis à un salarié une proposition de contrat de travail prévoyant un changement de lieu d’affectation. Le salarié avait refusé de signer ce contrat et était retourné travailler sur son ancienne affectation, malgré l’interdiction de l’entreprise B. Celle-ci avait alors acté le refus du salarié en ne lui fournissant pas de travail et en ne le rémunérant pas.

Le salarié avait saisi les prud’hommes pour demander la résiliation judiciaire de son contrat aux torts de l’entreprise B. considérant que celle-ci avait manqué à ses obligations.

Refus du salarié de signer un nouveau contrat : il n’empêche pas le transfert du contrat initial auprès du nouvel employeur

La cour d’appel puis la Cour de cassation ont validé la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’entreprise B., estimant que le contrat de travail du salarié avait bien été transféré auprès de celle-ci et qu’elle avait manqué à ses obligations.

Les juges relèvent tout d’abord que l’accord collectif encadrant le transfert de marché prévoit que les contrats de travail des personnels sont transférés de plein droit au nouveau titulaire du marché et que ce transfert s'impose aux personnels qui deviennent salariés du nouveau titulaire du marché. En outre, il prévoit que le nouveau titulaire du marché informe par courrier les salariés de leur changement d'employeur et de leur nouveau lieu d'affectation.

Ensuite, les juges estiment que l’employeur ne peut pas invoquer à son profit la méconnaissance de l’obligation de recueillir l’accord exprès du salarié à son transfert, puisque cette règle est édictée dans le seul intérêt du salarié. Ainsi, l’entreprise B. ne pouvait pas invoquer l’absence d’accord du salarié à son transfert, résultant du refus de ce dernier de signer son contrat de travail, pour considérer qu’elle n’était pas son nouvel employeur.

En tout état de cause, au vu des circonstances de l’espèce, les juges ont considéré que le salarié avait accepté le transfert de son contrat de travail, peu important son refus de signer la proposition de contrat prévoyant un changement d’affectation.

En pratique, il a été reproché au nouvel employeur de n’avoir pas notifié par courrier au salarié son nouveau lieu d’affectation comme l’accord collectif l’exigeait. En outre, lorsque le salarié s’était présenté sur son ancien lieu de travail, il aurait dû lui indiquer qu’il était attendu sur son nouveau lieu d’affectation.

L’employeur n’ayant pas fourni de travail ni rémunéré le salarié a commis un manquement grave justifiant la résiliation du contrat à ses torts. L’entreprise B. a donc été condamnée à verser au salarié des indemnités de licenciement et de préavis et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cass. soc. 12 juin 2019, n° 17-21013 D

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