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Social

Hygiène et sécurité

Santé au travail : les propositions des rapports Lecocq et Frimat

Deux rapports consacrés à la santé au travail et à la prévention ont été remis officiellement aux pouvoirs publics les 28 et 29 août 2018. Le premier a une portée générale (rapport « Lecocq »), le second est consacré aux expositions aux agents chimiques dangereux (rapport « Frimat » ; voir encadré). Synthèse des recommandations susceptibles d’intéresser les entreprises.

La lettre de mission remontait au 28 janvier 2018. Finalement remis au Premier ministre le 28 août, le rapport « Lecocq » propose une série de 16 recommandations visant à favoriser l’accès des entreprises aux dispositifs de prévention.

Intitulé « Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée », a été établi par une députée (Mme Charlotte Lecocq), un consultant senior en management (M. Bruno Dupuis) et un ancien secrétaire confédéral de la CFDT (M. Henri Forest), avec l’appui de M. Hervé Lanouzière (IGAS).

Les conclusions de ce rapport vont alimenter les réunions bilatérales avec les partenaires sociaux en vue de l’élaboration d’un programme de travail en matière sociale. Une négociation interprofessionnelle dont le champ reste à fixer pourrait se tenir sur la base de ces orientations.

Pour ce qui concerne les entreprises, on notera en particulier les propositions suivantes.

Création d’une contribution unique « santé au travail »

Le rapport suggère de regrouper les contributions financières aux services de santé au travail interentreprises et celle destinée à l’OPPBTP (pour les entreprises concernées) avec celles des AT/MP au sein d’une contribution unique « santé au travail » recouvrées par les URSSAF.

Cette contribution serait modulable selon le risque de l’entreprise et son engagement en matière de prévention .

Simplification de l’évaluation des risques

Une autre recommandation vise à « simplifier » l’évaluation des risques pour la rendre « plus opérationnelle ».

Pour atteindre cet objectif, trois mesures sont proposées :

-limiter la formalisation de l’évaluation aux risques majeurs dans les plus petites entreprises ;

-rendre obligatoire un seul document pour toutes les entreprises - le plan de prévention des risques - qui intégrerait les éléments d'́évaluation et se substituerait ainsi au document unique d’évaluation des risques (DUER) ;

-faire accompagner les entreprises pour l’élaboration de leur plan de prévention par les structures régionales (voir plus loin), et supprimer en conséquence la fiche d’entreprise.

Proportionner les obligations et moyens aux spécificités des entreprises

Enfin, le rapport invite les pouvoirs publics à proportionner les obligations et moyens à déployer dans les entreprises en fonction de leur spécificité́ et des risques effectivement rencontrés.

Pour ce faire, deux propositions sont affichées :

-revisiter la réglementation dans une recherche de simplification et d’efficacité ;

-rendre les décrets applicables à titre supplétif lorsque l’entreprise adopte des mesures de prévention qui répondent au même objectif que la réglementation.

Mise en place d’une structure régionale de prévention

Chaque entreprise devrait pouvoir accéder par un guichet unique à une offre de service homogène sur l’ensemble du territoire, couvrant l’intégralité des services auxquelles l’entreprise peut prétendre dans sa région. Cette offre de service inclurait en particulier les éléments suivants :

-suivi individuel obligatoire des salariés ;

-accompagnement pluridisciplinaire en prévention ;

-aide au maintien dans l’emploi (par exemple, via l’intervention précoce dans le parcours de soins) ;

-formation des acteurs de l’entreprise en matière de prévention ;

-conseil aux entreprises dans le choix d’un intervenant externe habilité.

La porte d’entrée dans le système serait une structure régionale de prévention (appelée « Région santé travail »), qui regrouperait :

-les services de santé au travail interentreprises ;

-les compétences des ARACT (associations régionales pour l’amélioration des conditions de travail) ;

-les agents des CARSAT (Caisses d’assurance retraite et de la santé au travail) affectés aux actions relevant du champ de la prévention et de l’appui technique (formation en prévention, laboratoires) ;

-et les compétences des agences régionales de l’OPPBTP.

La mission de la structure régionale serait clairement orientée vers la prévention, pour tenter d’instaurer, selon le rapport, une relation de confiance avec les entreprises.

Les activités des CARSAT seraient recentrées sur leur cœur de métier, à savoir notamment une fonction d’assureur (réparation et tarification de la cotisation AT). La mission de contrôle de la conformité au droit sera exercée par l’inspection du travail dans les DIRECCTE. Cependant, les CARSAT ou DIRECCTE conserveraient leur rôle de conseil. À ce titre, elles pourront orienter les entreprises vers la structure régionale pour bénéficier d’un accompagnement en matière de prévention.

Création d’une cellule dédiée aux risques psychosociaux au sein des structures régionales

Le rapport propose de mettre en place, au sein de chaque structure régionale, une cellule spécifiquement dédiée à la prise en charge des risques psychosociaux (RPS).

Cette cellule pourrait intervenir dans plusieurs contextes :

-à la demande d’une entreprise souhaitant engager une démarche de prévention ;

-à la demande d’un salarié ou travailleur indépendant souhaitant bénéficier d’un appui à la gestion de ses RPS, indépendamment de l’entreprise et dans le respect de la confidentialité ;

-en cas de signalement de RPS laissant craindre des facteurs pathogènes dans une entreprise, une organisation, ou un secteur d’activité.

Rapport Frimat sur les agents chimiques dangereux (ACD)
Remis officiellement le 29 août 2018 à la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, le rapport établi par M. Paul Frimat (1) porte sur la prévention et la prise en compte de l’exposition des travailleurs aux agents chimiques dangereux (ACD). Il contient 23 recommandations, dont nous présentons ici une sélection.
• Compléter la liste des travaux interdits aux salariés en CDD ou en contrat d’intérim en matière d’ACD
• Améliorer l’articulation entre les mesurages de l’exposition des travailleurs aux agents chimiques et la mise en œuvre effective de mesures de prévention
• Création d’un dossier ACD qui listerait certaines informations (identification des produits chimiques et de leurs dangers, groupe d’exposition homogène de salariés, notices de poste, équipements de protection, etc.) et qui, après consultation et avis du comité social et économique (CSE), serait à adresser aux services de santé au travail (SST)
• Création d’amendes administratives en cas de non-respect d’obligations formelles en matière de risque chimique (ex. : absence d’évaluation du risque chimique, transmission du dossier ACD, avis du CSE sur ce dossier)
• Extension de la procédure d’arrêt temporaire d’activité à certains ACD en cas de manquement grave à des mesures essentielles de prévention
• Mise en place une nouvelle ristourne travail (« bonus »), applicable à tout ou partie des entreprises, en insérant des conditions nouvelles en termes de démarche de prévention du risque chimique
• Création d’un dossier d’entreprise tenu par les SST
• Assurer la transmission aux SST des principaux documents utiles en matière de prévention et de traçabilité du risque chimique
• Création d’un point de rencontre annuel entre les entreprises et les SST interentreprises sur le sujet des ACD en présence des représentants des salariés au CSE
• Renforcer le suivi post-professionnel et post-exposition des salariés exposés à certains ACD
• Mieux prendre en compte l’exposition aux ACD via notamment des abondements au compte personnel de formation :

-pour des suivis d’expositions validés par les SST au-delà d’une certaine durée, même en l’absence de maladie professionnelle reconnue ;

-en cas de maladie professionnelle liée au risque chimique ou à un mécanisme allergique, même si le taux d’IPP est inférieur à 10 %.

• Faciliter la reconnaissance des maladies professionnelles à effet différé́ (cancer, pathologie dégénérative…)
(1) Professeur des universités et praticien hospitalier de l’université de Lille, spécialiste de la santé au travail. Rapport établi avec l’appui et le soutien de la direction générale du travail et de la direction de la sécurité sociale. La lettre de mission remonte au 20 novembre 2017.

Rapport Lecocq « Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée » https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_lecocq_sante_au_travail_280818.pdf ; Rapport Frimat sur prévention et la prise en compte de l’exposition des travailleurs aux agents chimiques dangereux https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_professeur_frimat.pdf

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Date: 01/11/2024

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